Le bouc émissaire comme méthodologie d’analyse institutionnelle

Origami :

Le bouc émissaire comme méthodologie d’analyse institutionnelle,

partie reliante du livre Bouc émissaire : le concept en contextes

Rémi CASANOVA

Rémi Casanova analyse institutionnelle et bouc émissaire dans le livre bouc émissaire, le concept en contextes

Rémi Casanova articule analyse institutionnelle et bouc émissaire

La théorie du bouc émissaire pour interroger les contextes

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« Les théories du bouc émissaire permettent de comprendre les finalités, enjeux et modalités du processus. Elles autorisent à mesurer et penser la prégnance du mécanisme dans un contexte donné. Elles offrent la possibilité de problématiser un environnement au regard d’un concept clé, celui de la crise rivalitaire et d’une problématique énigmatique, celle du poids des tabous sur la vie du groupe. »

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« Le mécanisme du bouc émissaire, parce qu’il se fonde sur les antagonismes cachés, les rivalités dissimulées, les tabous et leur indicibilité, ouvre les espaces féconds aux intentions de l’analyse institutionnelle. En devenant une grille de lecture puis une méthodologie de compréhension de l’institution, le phénomène du bouc émissaire participe de l’analyse des processus en institution et, par extension, de l’analyse institutionnelle. »

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« À travers les analyseurs qu’elle propose, cette méthodologie est avant tout une réponse, par les questions ouvertes qu’elle pose, par la réflexivité et la prise de conscience qu’elle génère, par les stratégies que les acteurs trouvent, individuellement, collectivement et institutionnellement (Casanova, 2009). »

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Le pharmakon, outil-balise méthodologique

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« Mais en tant que méthodologie d’analyse institutionnelle, il se dote également d’un autre outil, balise fluctuante au gré des aléas de la vie du groupe : il s’agit du pharmakon. « Un pharmakon – Homère déjà emploie le terme – est à la fois un poison et un remède […] » (Eck, 2011, p. 20). »

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Appliqué à la vie institutionnelle, nous considérons le pharmakon comme un moment combiné à un objet. Le moment est celui du basculement du remède au poison ou inversement. L’objet est toute composante de l’institution, que ce soit dans ses aspects matériels ou immatériels. Cette vision du pharmakon s’inscrit dans la tradition de la pensée grecque notamment lorsque Socrate interpelle Phèdre dans l’œuvre de Platon. »

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Les indicateurs clés comme outillage méthodologique

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« Il est nécessaire de considérer, avant même d’entrer dans la mesure et l’analyse du phénomène, de repérer deux principes simples qui en font le terreau fertile : en quoi la crise mimétique est-elle, structurellement, favorisée ou freinée ? Les interdits anthropologiques fondateurs de toute société sont-ils respectés ? »

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Rémi Casanova, bouc émissaire et silence des tabous, livre sur le concept de bouc émissaire dirigé par F-M Noguès

Rémi Casanova, la théorie du bouc émissaire comme outil d’analyse institutionnelle

« Il est assez aisé de connaître ce qui, de manière générale, est recherché en institution : le pouvoir, la reconnaissance, les avantages, le respect etc. Il devient alors facile de contextualiser ces éléments pour sonder le niveau de rivalité et de concurrence et le placer sur une échelle graduelle de l’absence à la présence prégnante. »

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Les quatre indicateurs de la « santé » de l’institution

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« Le premier des indicateurs est la mesure de la fréquence du phénomène. Par précaution déontologique et méthodologique, on sera attentif à ne pas confondre le phénomène avec ce qui peut lui ressembler : il ne suffit pas en effet d’une exclusion, d’une expulsion, d’une rivalité mimétique, encore moins d’une stigmatisation pour qu’on ait à faire au mécanisme. Les indicateurs nécessaires, rappelons-le, sont ceux de la substitution et de la violence suffisamment unanime. »

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« Le deuxième indicateur est relatif à la place et la force institutionnelles de la victime, nous pourrions dire son « poids » initial. Par « poids », nous entendons son importance, sa densité, sa vigueur, sa force, sa puissance, son énergie, son pouvoir, son autorité, pourquoi pas sa fermeté, son endurance, sa capacité de résistance voire de nuisance. Ceci au début du processus. »

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Conclusion

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Rémi Casanova, bouc émissaire et tabous institutionnels

Rémi Casanova propose le pharmakon pour analyser le mécanisme du bouc émissaire

« En parallèle du pharmakon, objet de toutes les attentions, l’effet cumulatif des principes préalables (rivalité mimétique et interdits fondateurs) et des quatre indicateurs que nous avons évoqués, constitue un espace matriciel de développement du phénomène du bouc émissaire. L’espace est celui de l’institution, dans ses dimensions spatiales et psychiques (Castoriadis, 1975) ; la matrice renvoie à ses fondements, ses racines, son histoire en même temps que les processus à l’œuvre, qui la traversent de toute part. »

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« Déclencher une dynamique et une démarche en sens inverse revient alors à bâtir l’institution non pas sur l’exclusion mais sur l’intégration ; non pas sur la rivalité mais sur l’alliance et la complémentarité ; non pas sur la culpabilisation mais sur la responsabilisation ; non pas sur le mimétisme mais sur la différenciation ; non pas sur l’expiation mais sur la réparation ; non pas sur la concurrence mais sur l’émulation ; etc. »

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